
Il s’est glissé dans la peau d’un chanteur vieillissant dans Guy, dans celle d’un joueur de tennis professionnel dans Cinquième set, joue les maris aux intentions malhonnêtes dans La vengeance au triple galop, parodie des Feux de l’amour. Sur scène, il aime inventer une multitude de personnages dans ses seuls-en scène lors desquels il n’hésite pas à monter à cheval ! On le constate, dans ses rôles comme dans ses créations, Alex Lutz aime faire le grand écart.
Humoriste, acteur, réalisateur, metteur en scène, Alex Lutz a également dévoilé un autre de ses nombreux talents récemment : l’écriture avec la parution, en 2020 de son premier roman Le radiateur d’appoint. Une galerie de personnages dans une galerie commerciale vue par un narrateur un peu particulier : un radiateur défectueux. « En écrivant, j’ai la sensation de couver un œuf pendant très longtemps : cela peut durer dans un coin longtemps avant qu’un passage n’existe mais ce timing est important pour écrire tout en nuance. Les personnages qui m’intéressent et me passionnent le plus sont ceux qui ont de la nuance car ils me désarment », expliquait l’auteur dans un entretien sur France Inter.
Écrire pour être lu, un autre exercice de style pour l’artiste, jusqu’à présent habitué à écrire pour un public ou des spectateurs ? « L'écriture a toujours été là. En moi. J'écris des scénarios, des synopsis. Cette écriture-là ressemble vraiment à un roman, expliquait-il à France 3. Quand vous écrivez une pièce, un scénario ou un sketch, vous avez tellement envie d'y être que la période d'écriture est tendue, agaçante, laborieuse tandis qu'ici, l'écriture est son propre objet. Ce n'est pas du tout pareil. »
Deux Molière et un César
Avant ce métier très solitaire de l’écriture, Alex Lutz a d’abord manié la langue française au théâtre et en troupe : celle des Foirades à Strasbourg dans laquelle il a fait ses premiers pas en tant que comédien et assistant à la mise en scène, puis Le coût de la pomme, fondée en 2002 et avec laquelle il a créé plusieurs spectacles en province. En montant à Paris, il fait ses premiers pas de comédien à la télévision et fait plusieurs rencontres déterminantes avec Sylvie Joly, dont il co-écrit et met en scène le dernier spectacle La Cerise sur le gâteau.
Le grand écran lui tend alors les bras. Michel Hazanavicius lui offre son premier rôle en 2009 dans OSS 117 : Rio ne répond plus dans lequel il campe un fils de nazi. Il poursuit en parallèle sa carrière dans le seul-en-scène et le théâtre. De 2011 à 2019, il parfait son art du travestissement sur la chaîne cryptée Canal + où le grand public le rencontre sous les traits de la blonde Catherine, qui, avec sa comparse Liliane, donne son avis tranché sur l’actualité.
Dans les pas de Raymond Devos
En 2016, il reçoit son premier Molière de l’humour, puis un deuxième en 2018. Il se lance dans la réalisation avec un premier long métrage, Le Talent de mes amis. En 2019, c’est la consécration avec son second film, Guy, pour lequel il remportera le César du meilleur acteur pour son interprétation de Guy Jamet, un chanteur de variétés sur le déclin. Là encore, sa capacité à se transformer et à capter les expressions et mimiques de ses personnages font mouche.
Tous ces talents d’écriture et d’interprétation ont permis à Alex Lutz de remporter, en novembre dernier, le Grand prix Raymond Devos de la langue française 2022. Créé en 2003 par le ministère de la Culture en collaboration avec le comédien, disparu en 2006, ce prix récompense un artiste dont l'œuvre contribue à l'invention de la langue française, à son rayonnement et à sa promotion. Le parrainage de cette 28e édition s’inscrit donc une volonté de transmettre la richesse de la langue française. La cérémonie de remise des prix se déroulera dans le cadre de la Semaine de la langue française et de la Francophonie, au cours d'une soirée d'hommage à Devos.